A dos d’hommes, Sebastien Castella et Clemente, sont sortis en triomphe des Arènes d’Arles et descendu tout sourire l’escalier du Parvis des Arenesoises au terme d’une après-midi pleine pour les deux toreros français. Quelques minutes plus tôt, Sergio Nuñez Salvatierra, le mayoral d’El Parralejo était invité par les triomphateurs à se joindre à la fête et a fort justement salué pour le lot lidié à l’occasion de cette corrida d’ouverture de la 60eme Feria de Pâques.

Pour sa présentation dans les Arènes d’Arles, le fer andalou avait conduit en Provence un lot bien présenté, correctement armé et charpenté, surtout l’ultime très grand et lourd. Brave sous le fer le 3, de loin le toro le plus complet de la course, bravito également sur le premier assaut le 1, tandis que les 4 et 5 rentrèrent fort dans le matelas sans s’y employer plus que de raison. Dans le dernier tiers, tous furent parfaitement exploitables à l’exception du vil 6eme, atorado et violent. Bons et mobiles les 1 et 2, avec davantage de transmission les 4 et 5, la classe en plus chez le 3eme, qui aurait mérité les honneurs d’un tour de piste posthume. Tous furent raccompagnés par des applaudissements nourris, hormis l’ultime.

Seule ombre au tableau, un temps maussade qui a probablement dissuadé certains aficionados de rejoindre Arles ce samedi.

A 16h48, Tristan Barroso, montois et français, né à Madrid fut intronisé au nouveau grade de matador de toros par Sebastien Castella. L’impétrant torero dédia le premier toro adulte de sa carrière à ses parents et sa grand-mère avant de démontrer son potentiel dans une faena particulièrement bien menée, débutée par doblones et poursuivie par un très bon travail muletero droitier. A gauche, « Ginete », le toro de la cérémonie demandait un peu plus de métier pour donner la pleine mesure de son bon fond. Le retour droitier fut de fort bonne note, le montois éclairant sa partition de quelques détails bienvenus. Hélas, après un bon final en se ployant, Barroso perdit tout le crédit de son labeur avec les armes. Demi-lame dans le haut et une kyrielle de descabello.

Nada que contar avec l’ultime, un torazo haut et lourd, rapidement court de charge, devenu violent faute de moyens. Le nouvel entrant dans l’histoire des « matadors de France » tenta de jouer des coudes pour s’imposer, au gré des avertissements sans frais décochés par le cornu. Nouvelle déconvenue à l’épée. Tristan Barroso est sorti déçu cela va de soi, du vaisseau arlésien. Il peut l’être pour le résultat comptable, pas pour le contenu. Car le garçon, avec cape et muleta, a quelque chose a dire…

Sebastien Castella avait fait d’Arles, la première étape de sa tournée française 2025, avec la ferme intention de frapper un grand coup. Face à son premier, qui freina d’emblée dans les plis de cape, puis piqué à l’économie, Sebastien Castella se montra dominateur et patient, jouant d’aguante et de maitrise devant un Parralejo animé, mais juste de forces qu’il fallait consentir à mi-hauteur. Le torero de Béziers signe une faena d’abord inégale puis d’intensité croissante jusqu’au final remarquable dans des terrains parfois compromis. Espadazo final. Deux oreilles, la seconde généreuse.

Le cuarto possédait davantage de poder et de vibrations dans ses charges. L’astado rentra fort dans le matelas les deux fois, bien qu’il y poussât peu. Dans le dernier tiers, « Leguleyo » proposa au maestro de Béziers de composer fort bien avec d’intense charges et parfois quelques accès de violence qu’un Castella dans un fauteuil rectifia en deux temps trois mouvements. Aguante et domination dans un ensemble allant toutefois à menos. Terrains réduits pour un toreo de proximité tout en maitrise avant entière tombée et un grand coup de descabello. Oreille.

Clemente est assurément un torero de cante grande comme il n’y en a que peu. Mais aussi un véritable valiente dans le sens le plus noble du terme. Sa faena face au quinto, la meilleure et de loin de l’après-midi, est une ode au toreo d’inspiration. Le bordelais déploya s’abord sa cape pour une réception excellente par véroniques, enchainement de chicuelinas millimétrées et la demie de rodillas. L’entame muletera, par le haut, les deux genoux dans le sable avait quelque chose de « morantesque ». Muleta en main, Clemente fut d’un empaque remarquable, absorbant « Molinero » dans d’intenses séries droitières de grand son. Du temple et du sens, pas de scories, rien d’inutile et tout de nécessaire. Le final, pieds joints au plus près des cornes, comme l’avant dernière étape d’une faena rotunda. L’ultime : l’épée, assurément celle de la tarde. Deux oreilles.

Auparavant, l’aquitain obtint une oreille de l’excellent troisième, brave sous le fer et puissant dès ses premiers assauts dans la muleta, chargeant de loin et baissant la tête avec beaucoup de classe. Clemente réussi le tour de force de dompter « Regeara » les caprices d’Eole, forts capricieux. Faena marquée par la finesse du toreo déployé, et d’une grande interpretation. Final ajusté par luquecinas puis manoletinas spectaculaires avant qu’une lame très engagée mais portée en arrière, ne divise par deux la récompense.

FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA

Arènes d’Arles. Feria de Pâques. Environ 3/5 d’arène. Ciel voilé, vent gênant. 6 toros de El Parralejo.

Présidence : Mr Lescot assisté de Mme Hoteman et Mr Gueyraud

Poids des toros : 510, 520, 515, 500, 530, 555.

Cavalerie Bonijol. 12 rencontres.

Tristan Barroso a pris l’alternative devant le toro « Ginete » n°41 né en octobre 2020, negro de 510 kilos.

SEBASTIEN CASTELLA (dragée et or) : deux oreilles après avis et oreille après deux avis

CLEMENTE (vert anis et or) : oreille après un avis et deux oreilles

TRISTAN BARROSO (ardoise et argent) : silence après avis et silence après avis

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