Il a toréé comme il était venu, humblement, avec tout son cœur et sa passion, écrivant la belle histoire de cette corrida de clôture de la Feria des Prémices du Riz. Alvaro de la Calle, habituel torero dans l’ombre de ses confrères a saisi à bras le corps l’opportunité qui était la sienne de démontrer sa valeur, cette fois dans la peau du titulaire. Le torero de Salamanque a coupé la seule oreille de la tarde, celle d’un grand toro du fer des Héritiers de Yonnet nommé « Cemaphore » fort justement primé d’une vuelta posthume.

Corrida de competencia sous forme de mano a mano ganadero avec six toros inégaux de présentations, d’armures et de comportements. Supérieurs en tout, à mon sens, les 3 Yonnet orchestrant la première mi-temps. Trois toros charpentés, hauts surtout les 2 et 3, et armés. Tous rentrés avec promptitude dans les matelas de la Cavalerie Bonijol puis s’y employant avec plusieurs degrés d’investissement. Meilleur dans l’exercice le 2, qui mis les reins avec bravoure, à un degré moindre le 1 et plus spectaculaire dans ses arrancadas que dans ses poussées le 3, véritable immeuble armé de deux poignards. Exigeant au dernier tiers le 1er, d’une bravoure infinie le second et très compliqué le 3. Puis vinrent 3 Escolar Gil. Carrossé, lourd et armé le 4 (sobrero de Pamplona), plus modestes de carcasses et d’armures les 5 et 6. Tous discrets sous le fer, malgré des charges prises à distance, notamment pour le 4 qui s’élança par trois fois vers la pièce montée. Meilleur au dernier tiers le 4, inventé par Domingo Lopez Chaves, viril et de mala casta le 6, le quinto s’invalida en cours de route.

Domingo Lopez Chaves, comme à son habitude évolua en impeccable lidiador. Son premier « Beauduc » de Yonnet, très exigeant après deux rencontres se devait d’être consenti avec fermeté. Le salmantin orchestra un trasteo méritoire, composé de plusieurs séquences valeureuses, par naturelles aidées notamment devant un toro agile de ses bois et brut. Lame tombée en conclusion, salut pour le piéton et palmas à l’arrastre du bicho. Le diestro de Ledesma hérita ensuite de « Curadero », un Escolar Gil élancé trois fois vers le ulhan et qui joua de mauvais tours aux banderilleros. Entre les mains expérimentées d’un Lopez Chaves l’astado y révéla une bonne charge, parfois noble notamment sur l’aile droite. Entame parfaite en baissant la main, genou fléchi et grande série de derechazos au centre, puis deux, puis trois. Faena de mando et de dominio, à l’intensité décroissante suite aux échanges gauchers de moindre calibre. Lame delantera et double échec avec le verdugillo.

Invité à saluer d’une ovation avant son premier combat, Alvaro de la Calle salua d’un agréable maniement de la percale l’arrivée de « Cemaphore » par quelques véroniques bien combinées, pieds bien à plat malgré une gestuelle parfois un peu rigide. Il brinda à Jean-Baptiste Jalabert sa première faena devant ce grand toro de Yonnet. Bon début en gagnant le centre pour d’admirables mouvements droitiers, bien ciselés et avec un certain gout. Faena en deux parties, supérieure la première, le salmantin faisant le job avec ses armes et toute son âme mais restant globalement en dessous de ce toro à la bravoure infinie. Mais peut-on réellement en exiger d’avantage d’un homme dont le dernier paseo comme « titulaire » date de six années en arrière… Alvaro de la Calle fit bien les choses, avec lucidité et application et son bonheur de toréer était beau à voir. Trois quart de lame sincère et oreille que l’on imagine volontiers de poids. Son second, à la morphologie plus discrète et qui n’avait guère de fond s’invalida rapidement dans le dernier tiers et le torero le liquida d’un espadazo, non sans avoir tenter de se justifier, devant un public impatient…

Après-midi à oublier pour Maxime Solera qui il est vrai hérita du lot le moins propice. Son premier “Arelate”, haut et armé astifino se révéla particulièrement âpre, réfléchissant énormément en passant la tête haute dans la muleta du fosséen qui esquiva plusieurs fois des derrotes criminels. Maxime Solera, qui après avoir fait front avec cran dans un labeur dédié au rugbyman Nicolas Mas liquida le fauve d’un estoconazo. Son second, bien salué à la cape était un petit bolide de mauvaise caste, terriblement vif et exigeant. Plus abordable à gauche, Maxime y dessina plusieurs séquences valeureuses avec pas mal de cran et de témérité, accompagné par la bande. Avec son courage et ses ganas, le garçon venait de remonter le fil de son combat avec aplomb mais une terrible déroute avec les armes vint faire voler en éclats tout espoir de succès, le toro rendant les armes sur le gong…

A l’issue de la course, Charlotte Yonnet fut honoré du prix au meilleur toro, tandis que Jean-Loup Aillet reçu le prix au meilleur picador une preuve de plus de la bonne santé de la tauromachie française.

Demain, retour sur la novillada sans picadors matinale qui a vu le succès du torero arlésien Fabien Castellani.

FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA

Arènes d’Arles. ¼ d’arène. 3 toros des Hériters de Yonnet et 3 de Jose Escolar Gil (4, 5 et 6)

Présidence : Mr Maragnon, assisté de Mme Melani et Mr Rey.

Cavalerie Bonijol : 14 rencontres.

Poids des toros : 540, 560, 535, 570, 500, 540.

Vuelta al ruedo posthume au second « Cemaphore » n°85 né en 02/2018 de 560 kilos des Héritiers d’Hubert Yonnet.

Salut du banderillero Miguelin Murillo au 2e.

A l’issue de la course, Charlotte Yonnet fut honoré du prix au meilleur toro, tandis que Jean-Loup Aillet reçu le prix au meilleur picador.

DOMINGO LOPEZ CHAVES (rouille et or) : saluts et ovation

ALVARO DE LA CALLE (blanc rosé et or) : oreille et ovation

MAXIME SOLERA (vert empire et or) : silence et silence après deux avis.

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