Le temps d’une après-midi, Jean-Baptiste Jalabert est redevenu « Juan Bautista » dans une arène du Palio comble pour une affiche inédite. Marco Pérez, son protégé devenu matador à Nîmes quelques jours plus tôt, l’accompagnait au paseo, au lendemain même d’un mano a mano à Salamanque avec Morante de la Puebla. Une attente quasi religieuse jusqu’à l’heure des clarines et la première ovation de gala de cet après-midi caniculaire, pleine de détails et bons souvenirs.

Et comme si de rien n’était, comme si ces six années d’absences s’éclipsaient un mouvement, la magie ne s’est pas fait attendre. Dès l’ouverture, le toro de Jandilla s’offrait en un adversaire rêvé : noble, classieux, généreux dans sa charge. Après avoir dédié son combat à Marco Perez, Juan Bautista déroula une tauromachie pure, fluide, d’une élégance intemporelle, chaque passe semblant flotter dans l’air comme une citation à la beauté du geste. Juan Bautista, comme retrouvé, profita à l’envi des qualités du Jandilla pour livrer plusieurs séquences de haute volée. Condesinas, naturelles d’un temple millimétré puis luquecinas finales. De cante grande. Le public, emporté par cette partition pleine de cadence et d’harmonie, se leva comme un seul homme après une mise à mort foudroyante à recibir, d’une précision chirurgicale. Deux oreilles et la queue, le triomphe total, et l’ovation d’un Palio conquis, de nouveau.

Son second, du fer de La Quinta, plus discret tant en tamaño qu’en tempérament demanda au maestro arlésien de puiser dans son for intérieur. Avec patience et l’intelligence d’une lidia parfaitement calibrée, l’arlésien servit des séries mesurées, sans jamais forcer un animal qui ne donnait qu’à la condition d’être compris. Et il le fut, pour être ensuite embarqué dans plusieurs tandas ambidextres de belle note. Nouveau recibir foudroyant. Oreille.

Face au quinto, lourd de Juan Pedro Domecq, Juan Bautista invita Marco Perez a partager un quite por colleras chaleureusement applaudit. Au-devant d’un animal violent et brusque, Juan Bautista, qui avait brindé à ses enfants, usa de toute sa science pour tirer le meilleur parti du cornu qui, sur un derrote, lui infligea un coup violent au niveau de la poitrine. Seul un pinchazo avant entière le priva d’une oreille glanée au forceps, ce qui transforma la récompense en une vibrante vuelta al ruedo.

Marco Perez débuta avec un Jandilla noble mais juste de fond et de forces. Le salmantin montra toute l’étendue de son pouvoir pour embarquer le fauve dans plusieurs séries ajustées sur les deux ailes, de plus d’échos sur la corne droite et de plus de profondeur sur la rive opposée. Entière en place a recibir au deuxième voyage. Oreille.

Bravito au cheval en une seule rencontre, le cuarto de La Quinta arriva noble dans le dernier tiers. Marco Perez ne se fit pas prier pour se le mettre dans la cañasta et livra une partition d’un très haut niveau de maitrise, toréant « a camara lenta » la noblesse du cardeño. Sublimes tandas gauchères données avec beaucoup d’empaque suivies d’un sublime changement de main. Coup de canon foudroyant. Deux oreilles.

L’ultime, un joli jabonero sucio de Juan Pedro Domecq fut salué les genoux dans le sable avant une rencontre brève face au groupe équestre. Ce fut le show Savalli aux banderilles, l’arlésien clouant la deuxième paire en musique et sous l’ovation du Palio qui l’invita à saluer. Marco Perez initia les débats les jumeaux au sol avant poursuite sur les deux ailes dans un ensemble allant a menos. Devant un animal fade, et limité de parcours, le salmantin opta pour un toreo de proximité tout en maitrise, mais hélas les débats ne décollèrent jamais réellement. Pinchazo avant entière.

FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA

Arènes du Palio. No hay billetes. Grand soleil et chaleur caniculaire. Toros de Jandilla (1,2), La Quinta (3, 4) et Juan Pedro Domecq (5,6)

Présidence : Mr Cervantes assisté de Mr. Degioanni et Mr. Raoux

Poids des toros : 480, 490, 480, 475, 515, 500.

Cavalerie Bonijol. 6 rencontres.

Juan Bautista a brindé son premier combat à Marco Perez, le second à la mère et la sœur de Marco Perez et le troisième à ses enfants.

Marco Perez a brindé son premier combat au public, le second aux enfants de Juan Bautista et le troisième à Gregory Boyer.

A l’issue du paséo un tableau fut remis en piste en Juan Bautista et Marco Perez par François Bernardini, maire d’Istres, Patrick de Carolis, maire d’Arles en présence de Bernard Marsella empresa des Arènes d’Istres.

Mehdi Savalli a salué au sixième.

Sobresaliente : Miguel Angel Sanchez

JUAN BAUTISTA (tabac et or) : deux oreilles et la queue, oreille et vuelta

MARCO PEREZ (rouge et or) : oreille, deux oreilles et ovation

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