Au paradis de Camargue, le Marquis de Baroncelli peut être fier de ce qu’il a laissé à sa descendance taurine au soir de cette « Levée des tridents » édition 2021, qui demeurera comme le fut celle du 17 novembre 1921, historique !

Lorsqu’il amorça le premier rassemblement il y a 100 ans, le manadier du Mas de l’Amarée, Folco de Baroncelli-Javon avait soufflé sur sa cinquante-deuxième bougie. Les instigateurs cette « Levée des tridents 2021 », Thomas, Corentin et l’Union des jeunes de Provence et du Languedoc surfent sur la trentaine. Moins d’expérience, moins de vécu mais tout autant de fougue et d’aficion, de convictions et de détermination. Et il leur en a fallu pour que le bébé reste en leur possession. Un tel rassemblement, aussi historique et fédérateur aura attiré l’œil et l’appétit de quelques égos haut placés souhaitant se couvrir de lauriers, se gargariser de la réussite probante de l’affaire. Il n’en fut rien et c’est tant mieux. Il faut que jeunesse se fasse, qu’elle fasse et qu’on la laisse faire. Ce que l’on appelle communément l’avenir…

Ce dimanche, tout le peuple du toro ou presque était rassemblé sur le parvis des arènes, devant le Palais de Justice, sur l’esplanade Charles-de-Gaulle et depuis le Stade des Costières, qui aura vu du monde pour la première fois de la saison… Manadiers, ganaderos, empresas, toreros, raseteurs, aficionados, arlésiennes, chasseurs. Tous étions là pour défendre notre liberté, notre identité culturelle. Faire entendre nos voix. Défendre ce que nous ont transmis nos aïeux, avec ferveur, humanité, sagesse… Tous avions envie de démontrer « a lo grande » que nous sommes fiers de ce que nous sommes, que nous sommes fiers de porter haut nos couleurs, de porter le costume, fiers de nos matadors défiant nos toros de combat et de ceux qui les élèvent. Orgueilleux des tenues blanches qui relèvent le défi de nos noirs cocardiers de Camargue, et de ceux qui chaque jour de pluie, de vent, de canicule, trident porté fièrement les élèvent au rang de star. Fiers que nos pères et grands-pères nous aient transmis l’amour de la nature, un dimanche de chasse ou sur la croupe d’un blanc cheval de Camargue à travers les marais salants. De nous avoir fait apprécier l’air vivifiant de notre chère Camargue, qui ne serait plus aujourd’hui qu’un désert de sable et de sel, sans nos manadiers, nos taureaux, nos chevaux.

Cette « Levée des tridents » 2021, m’a donné foi, encore bien plus, en ce que nous sommes, peuple du taureau. Dans cette société liberticide, qui voudrait enfouir nos traditions et notre art de vivre dans les abimes de l’histoire, ne cessons pas d’être fiers et libres, car nous n’avons pas à justifier ce que nous sommes, nous n’avons pas à justifier notre amour de la terre, notre authenticité. Cent ans après le Marquis de Baroncelli, nos traditions sont toujours là, vivantes malgré les modes et les modes de vies changeant, malgré les coups, la bien-pensance, la bienséance. Héritiers du Marquis, nous nous devons toutes et tous, de maintenir la flamme et de transmettre cet héritage, sans cesse, sans peurs, fiers, libres avec panache et éloquence mais surtout unité, car c’est ce qui fait et fera notre force.

Après restitution du discours centenaire, entonné jadis par Bernard de Montaud-Manse, cette fois à charge du comédien Christophe Gorlier, ce sont succédé au pupitre diverses personnalités. Beaucoup par convictions, d’autres davantage attirée par l’odeur du sang ou pour continuer d’occuper l’espace public et faire croire que… Comme ce fut le cas lorsque le mouvement « Touche pas à mes passions » pris une ampleur telle que le chef de meute de la haute sphère taurine s’était empressé de couper l’herbe sous le pied à une jeunesse qu’il voudrait aujourd’hui à son écoute… Suivez mon regard…

Jean-Paul Fournier, maire de Nîmes, Guy Chaptal, président de la Confrérie des Gardians de Saint-Georges, Daniel-Jean Valade, Béranger Aubanel, arrière-petit-fils du Marquis de Baroncelli puis sa majesté la Reine d’Arles Camille Hoteman, poignante. Mais aussi André Viard, puis Thomas Pagnon et Corentin Carpentier.

L’ancien torero landais, déjà brièvement évoqué plus haut devait sa présence à son titre au sein de l’ONCT et son rôle prépondérant à l’UVTF et qui en chef de file de la joyeuse bande qui l’entoure s’entête à niveler par le bas le déroulement du tiers de pique, nouvelle pique à l’appui. Vous savez celle qu’aucun des professionnels du dit tiers, d’ailleurs visiblement non-sondés, ne veulent alors que d’autres sujets bien plus essentiels, tels que celui des infirmeries dans les arènes, mériteraient davantage de réflexion. Soit. André Viard est un formidable photographe et un très grand orateur qui proposa un discours bien ficelé, mais qui ne transmis à l’assemblée que la seule envie d’aller se réchauffer à La Grande Bourse avec un café bien chaud. Un récit sans scories, bref passage de « Tauromachies Universelles », qui eut au moins le mérite de rappeler à certains l’origine du toro dans l’antiquité. C’est au moins cela de pris. Je n’ai rien de personnel contre ce monsieur, mais je me questionne encore et toujours, sur le sombre rôle qui est le sien au cœur des « hautes instances taurines » et qui semble diviser plus qu’il ne rassemble.

A l’opposé, un discours de Corentin Carpentier. Moins mesuré, moins policé, plus brut, plus vrai, plus parlant, chantant et qui n’avait que pour seule structure la foi, l’aficion, la fé di biou, l’estrambord. Tout ce qui anime cette jeunesse a qui l’on demande d’avancer la jambe, mais que l’on veut parfois opprimer, contrôler, freiner. Cette jeunesse qui veut le clamer haut, fort et par-delà les frontières de la Camargue, de Provence et du Languedoc. Un cri du cœur, pour une génération et une jeunesse qui n’a pas peur de lutter pour ses convictions et qui ne veut plus avoir à se disculper de ce qu’elle est !

Il y aura probablement un avant et un après ce 14 novembre 2021 comme il y eut un avant et un après le 17 novembre 1921. Gageons que le 17 novembre 2121 nos enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants pointent leurs tridents vers les cieux, pour rendre grâce de ce que nous leurs auront transmis, le relayant de nos ancêtres avec autant de passion, de cœur et d’espérances. Qu’ils entonnent la « Coupo Santo » avec autant de ferveur et d’appétence. C’est que le flambeau aura été transmis comme il est de notre devoir de le conduire. Pour cela soyons unis, plus que jamais.

LIBERTE POUR NOS TRADITIONS !

Ci-dessous, le discours de Corentin Carpentier, que je partage plus que jamais.

I’a cènt an, auriéu pouscu faire coumplateman aquéu discours en lengo prouvençalo. Sarié esta proun naturau, qu’à coustat de l’ensignamen dóu francés douna pèr lis escolo de la Republico, lou parla dis àvi èro naturalamen emplega en famiho, ço que se fai plus… Es ansin qu’aro,je ne l(aurais pas publié.  voulènt faire aquelo introuducioun en lengo nostro, acò m’a demanda un gros travai. Ço qu’èro naturau i’a un siècle, vuei, es devengu estraourdinàri… Aquelo evoulucioun es-ti nourmalo ?…

Il y a 100 ans j’aurais entièrement pu faire ce discours en Provençal.

Cela aurait été totalement naturel car par l’école de la République, on m’aurait permis la transmission de la langue de mes aïeux.

Mais aujourd’hui, si je peux faire cette introduction en provençal, cela m’a demandé énormément de travail pour pouvoir mettre en avant notre magnifique langue ! 

Ce qui était naturel il y a 100 ans deviendrait presque exceptionnel aujourd’hui… et c’est la question de ce centenaire, toute cette évolution était-elle bien normale ?

Je fais partie de cette jeunesse moderne à l’aise dans ses pompes, iPhone en main en permanence et hyperactif sur les réseaux sociaux… mais pour autant, je suis profondément ancré dans mes racines et dans ce territoire. Je sais monter à la tête d’un taureau de Camargue pour l’attraper en abrivado, je sais sortir capote en main affronter le bétail en piste, je sais aller pêcher sur la digue du Grau du Roi, je sais accompagner mes amis à la chasse, comprendre un ancien qui me parle Provençal, je sais tailler une vigne, reconnaître des oiseaux dans les marais de Camargue

Il y a 100 ans, le Marquis de Baroncelli remettait sur pieds la race pure de Camargue, 5 ans plus tard d’ailleurs c’était la Croix de Camargue qu’il nous offrait avec ces valeurs bien ancrées dans le cœur des Camarguais et Provençaux « Foi / Charité / Espérance. »

100 ans plus tard où en sommes-nous ?

Oui, les valeurs de notre chère Camargue sont celles-ci ! Un peuple fier et libre, solide sur sa Fe. Charitable pour la partager et transmettre sa passion, confiant dans l’avenir de sa terre, de son identité et de ses traditions.

Il faut tout d’abord noter que de manière parallèle, beaucoup de territoires français à forte identité revendiquent de plus en plus fort leur droit de singularité et diversité des patrimoines régionaux.

Car oui, chers passionnés, l’évolution de notre société est inquiétante. Les minorités activistes se transforment en véritables tyrans de la pensée unique et binaire : 

Je n’aime pas l’élevage, donc j’interdis

Je n’aime pas l’agriculture, donc

Je n’aime pas les traditions, donc

Je n’aime pas la chasse, donc

Je n’aime pas les coqs et les églises, donc

Je n’aime pas le bruit des cigales, donc

Je n’aime pas la viande, donc

Elle serait si triste cette société qu’ils tentent de nous imposer !

100 ans après la Levée des Tridents, notre plus gros danger est l’aseptisation de notre société.

Je ne veux pas revenir sur les nombreuses attaques que nous subissons chaque jour… animalistes, administratifs, assureurs et politiques, il n’y a que les visages qui changent mais la tendance de fond reste la même : une façon de bien penser, les autres étant des attardés, dégénérés, voire barbares !

Nos territoires bougent trop, brassent trop de monde, prennent trop de risques, le lien social est jugé trop fort dans une société qui se veut individualiste…

On diminue le nombre de jours de fêtes votives, on supprime les voitures de fêtes, on assure plus, on veut du risque 0 là où nos passions se nourrissent du risque, on fait passer nos rassemblements pour des rassemblements d’alcooliques violents, on attaque la corrida, on attaque les agriculteurs et éleveurs, on éradique certains modes de chasses traditionnels, on détruit des zones agricoles. Et j’en passe !

Vous vous posiez encore la question du pourquoi de notre présence ? Eh bien vous l’avez ! Nous sommes ici pour unir nos forces !

Le Marquis de Baroncelli l’avait déjà compris il y a 100 ans, l’UNION FAIT LA FORCE. La division serait mortelle et certains feraient mieux de s’en rendre vite compte avant qu’il ne soit trop tard. Les traditions devront toujours être placées au-dessus des egos et de la gloire personnelle !

En souvenir de l’incroyable fédérateur qu’était le Marquis de Baroncelli, 

Nous sommes ici pour défendre le camp des libertés ! 

Nous sommes ici pour défendre le camp des traditions !

Nous sommes ici pour défendre le camp de l’authenticité ! 

Nous sommes ici pour défendre le camp du beau !

Quelle plus grande et belle liberté que de pouvoir flâner dans ces immenses espaces de Camargue, dans les Vallées Cévenoles, en Provence ou encore dans les Landes, dans ces territoires si beaux, si sauvages, si préservés !?

Merci à celles et ceux qui les protègent !

Quelles autres traditions défendre que celles qui apportent autant d’émotions, de respect, de partage et de lien social que nos traditions taurines, dans leur ensemble !?

Merci aux mainteneurs de nos traditions !

Quelle autre authenticité défendre que celle de nos aînés avec leur accent si chantant, parlant ces si riches langues régionales qui se perdent !?

Merci à vous ! OSCO !!

Quelle autre beauté promouvoir que ces mains d’agricultrice et agriculteurs qui font parler la terre et qui la font nous nourrir avec passion et patience ?!

Merci à vous gen dou terraire !

Quelle autre beauté que celles de nos chasseurs qui partagent leur connaissance pure et passionnée de la faune et la flore ?

Merci à vous !

Quelle autre beauté défendre que celle de nos blancs chevaux de Camargue ? 

Quelle autre beauté défendre que celle de nos noirs taureaux de Camargue, véritables Rois de nos territoires !

Merci à celles et ceux qui les élèvent avec passion !

Quelle autre beauté défendre que celle de l’union totale du torero et du toro, du raseteur et du cocardier, dans une danse épique où la vie et la mort s’entremêlent. A l’image de nos vies.

Merci à vous, créateurs de beauté et d’émotions infinies !

Nous pourrions passer des heures à lister toutes ces choses qui nous procurent le grand frisson. Ce frisson qui nous rappelle à quel point le monde rural que nous représentons est vivant et doit perdurer !

Il ne s’agit pas ici de tomber dans le danger du repli identitaire ! Nos valeurs, explicites, ont toujours été à l’encontre de cela : foi, charité, espérance

Si nos territoires ont jusque-là été si préservés, c’est bien parce que nos identités sont fortes, solides et s’appuient sur l’amour d’une culture et d’un terroir ! Quiconque partage cet amour entre dans la famille, qu’il vienne d’ici ou qu’il ait croisé le Rhône !!

Nos identités rayonnent bien au-delà de nos frontières et se partagent avec passion ! Elles ne sont pas discriminantes et permettent l’intégration de tous tant qu’on démontre que l’on s’y intéresse et qu’on les respecte. Elles hissent et sacrent même les meilleurs d’entre tous au rang de champion ! D’où qu’ils soient. Joachim C, Sabri Allouani, Mehdi Savalli, Morenito.

Vous avez pu remarquer notre campagne de communication axée sur la nouvelle génération, celle qui demain sera amenée à porter à son tour le flambeau de la maintenance ! 

Ces identités régionales préservées permettent aussi aux grandes femmes de s’élever !

Fanfonne la première est devenue une icône en Camargue et bien au-delà. Je pense aussi en revenant à des temps plus récents à Magali Saumade, manadière d’un Biou d’Or et Présidente de la Chambre d’Agriculture du Gard, à Florence Clauzel, une grande carrière à Paris puis le retour aux sources pour retrouver sa terre, le sauvetage de la FFCC et le grand Cocardier Greco. Tu nous manques, Florence. Je pense aussi Clotilde Manneau, directrice de la communication d’un grand groupe national, mais aussi manadière passionnée !

Et puis je pense à vous toutes, Cavalières, Amazone, Arlésiennes, vous êtes les fleurs à nos fusils, vous êtes la beauté, l’intelligence et l’authenticité de nos territoires ! Nous pouvons être fiers de vous avoir ! Frédéric Mistral parlait d’ailleurs si bien de vous !

Gens de Traditions, gens de la Ruralité ! Vous l’avez compris, nous avons à défendre le camp des Amoureux de l’authenticité et de la liberté ! Nous avons à défendre l’union entre toutes et tous !

Toi chasseur, toi manadier, toi ganadero, toi torero, toi l’Arlésienne, toi l’agriculteur, toi le passionné… nous sommes tous ensemble ! 

La Ruralité se réveille aujourd’hui pour lever les tridents, symbole des causes que nous défendons ! La jeunesse prendra toute sa part dans ce combat, car c’est notre héritage, notre avenir, et celui de nos enfants !!! 

Liberta per nosti tradicioun !!!

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