Deux corridas, deux Porte des Consuls, deux français à hombros. Pour la tauromachie française, ce week-end taurin aura été particulièrement riche puisque hier le jeune matador El Rafi et aujourd’hui l’arlésien Juan Leal ont traversé sur les épaules la célèbre grande porte nîmoise.

Le triomphe du jour, sans enlever le grand mérite d’un Juan Leal immense de courage et de détermination doit toutefois être pondéré face à la générosité maladive du balcon présidentiel nîmois qui après avoir permis hier samedi à Antonio Ferrera de promener un pavillon après une lame au milieu du dos, c’est une nouvelle fois distingué en laissant s’envoler deux mouchoirs synonyme de double triomphe et à la suite d’un bajonazo au sixième et dernier toro de la course.

Le lot de Fuente Ymbro, bien présentés dans sa globalité, le second armé et offensif, s’avéra discret face aux équidés de la cavalerie Heyral puis offrirent en grande partie du jeu à la terna du jour. Meilleurs les 3,4 et 6.

Vêtu d’un sublime terno rouge et azabache, Finito de Cordoba salua l’arrivée du premier de l’envoi par un bouquet de véroniques et trois demies de cartel. L’astado s’employa avec force lors de la première rencontre au point d’éjecter de sa monture l’homme à la lance. Deuxième rencontre sans histoire. Le natif de Sabadell est à créditer ensuite d’un trasteo fait d’altibajos… Dans le bas pour commencer, le Fino se montrant peu à l’aise face à un astado aux charges intempestives, face auxquelles le maestro de Cordoba pris le soin de reculer la jambe à chaque tanda, toréant de pico de façon systématique. Le chef de lidia du jour pris le temps de trouver la formule idoine d’un adversaire tardito mais animé face au leurre. Des hauts ensuite, par pinceladas le plus souvent dans un ensemble manquant de liant mais admirablement parsemé de remates savoureux, desdén et d’une poignée de naturelles structurées. De retour dans le « bas » au moment de conclure, Finito ne s’employant pas comme il se devrait et donc maniant piètrement les instruments létaux. Plusieurs tentatives sans succès qui laissèrent s’égrainer le sablier du temps au point d’entendre sonner le troisième avis. Le cordouan tenta de contourner la sanction à coups de descabello, eux aussi inoffensifs. Le maestro se retira sous bronca et quolibets pendant que le Fuente Ymbro regagnait vivant les chiqueros sous les applaudissements.

Le torero de Cordoue poussa ensuite son deuxième adversaire vers le lancier de service, médiocre les deux fois face à un adversaire sans style face à devant cette épreuve hélas succincte. Mais Finito de Cordoba ne voulait pas quitter la cité romaine sur une mauvaise note. Il trouva sur sa route un astado noble, humiliador et pourvu d’un parcours qui permettait à l’artiste de s’exprimer. Et il s’exprima, au plaisir avec son poignet de velours et une ceinture fluide, harmonieuse et qui laissa s’envoler quelques mouvements sublimes de toreria. Sur les deux mains, l’artiste andalou livra une partition de grande expression, douce, prenante. Une façon pour Juan Serrano « Fino » de renverser la vapeur, selon le toreo qu’il affectionne, avec art et sans scories. Une belle faena devant un bon Fuente Ymbro applaudit à l’arrastre. Avant cela, Finito sécha avec le verdugillo à la suite d’une entière tendida sans effet. Vuelta chaleureusement fêtée. 

Diego Urdiales demeura inédit cape en main face au second, offensif, armé et à la limite des six ans. Deux piques sans véritable style avant quite par gaoneras signé Juan Leal au résultat inégal. On ne peut pas dire que le torero de La Rioja ne fit pas d’efforts pour masquer les défauts de son adversaire, tardo et de peu de race. Urdiales le doubla d’abord par le bas en se ployant avant de gagner le centre où il tenta de composer avec le peu d’options offertes par l’opposition. Quelques mouvements isolés à bâbord dans un ensemble atone. A ce sujet il serait judicieux pour la crédibilité du balcon présidentiel de n’accorder la musique que lorsque cela est nécessaire et non lorsque pour passer le temps un mélomane en manque la réclame depuis les travées. Conclusion en deux temps et salut du torero riojano. 

RAS ou presque percale en main devant le quinto acapachado. Deux piques sans style entrecoupées d’une vuelta de campana n’aidant pas un astado déjà peu vil. Muleta en main le riojano du composer avec un animal de peu de forces, tardo et sans aucune expression. Urdiales distilla quelques rares tandas notables au milieu d’un désert d’émotions. Il liquida ensuite le fauve d’une entière, concluant une après midi sans peine ni gloire. 

Juan Leal salua le troisième par quelques véroniques de bon ton avant deux piques pour l’anecdote. Après avoir brindé au public, le maestro arlésien mis d’emblée les travées en ébullition avec une entame muletera par passe changée dans le dos les deux genoux à terre. La suite s’avéra plus inégale, Juan Leal alternant les muletazos bien guidés notamment sur la rive droite avec d’autres mouvements plus aléatoires et quelques enganchones. En face le toro à la devise verte de Cadix proposa quelques charges nobles mais pêcha par manque de punch. Le torero arlésien au sortir d’un muletazo droitier se fit spectaculairement cueillir, sans gravité apparente. Impressionnant d’aguante, le torero d’Arles opta, en adéquation avec le déclin de son adversaire pour un combat de proximité. Adornos, dosentinas, cambio por la espalda au menu qui reçurent un avis favorable du conclave qui réclama par la suite une oreille après un estoconazo porté en toute sincérité.

Après une réception correcte à la cape, l’arlesien confia le Fuente Ymbro au lancier pour deux rencontres sans style. Après avoir dédié son combat aux tendidos Juan Leal proposa un trasteo globalement similaire à son premier passage, fait d’aguante et de courage au devant d’un animal qui aurait pu prétendre au titre du meilleur élève de la tarde. Un bicho qui de part sa noblesse aurait à mon sens mérité un toreo plus posé et profond mais qui a véritablement conquis l’assemblée au point que celle-ci réclame deux nouvelles oreilles après une conclusion par bajonazo. Le plus inconcevable soit que le président de course y cède… Incompétence présidentielle quand tu nous tiens…

FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA

Arènes de Nîmes. Dimanche 13 juin 2021. 3000 spectateurs environ. 6 toros de Fuente Ymbro.

Organisation : Simon Casas France

Présidence: Mr Frederic Pastor.

Cavalerie Heyral. 12 rencontres.

Poids des toros: 552, 518, 539, 522, 550 et 532.

FINITO DE CORDOBA (rouge et azabache): bronca après trois avis et vuelta après avis

DIEGO URDIALES ( gris plomb et or): salut et silence

JUAN LEAL (mauve et or): oreille et deux oreilles

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