Morante enchante, les Jandilla déchantent, Ortega s’embrouille et Aguado démissionne. En une seule et même ligne pourrait tenir le résumé succinct de la troisième corrida de cette Feria de Pentecôte 2022. Un tarde de toros qui avait enregistré une entrée conséquente, sous le soleil et une chaleur caniculaire, balayée par moment par le souffle d’Éole.

Trio d’artistes, face à six toros de la ganaderia numéro 1 de la temporada passée. Corrida d’exception, corrida de déception. L’adage, hélas s’étant encore une fois confirmé. Côté bétail, la ganaderia au fer à l’étoile avait envoyé depuis la Finca Don Tello six exemplaires formant un lot disons correct compte tenu du lot de la veille. Bas, plutôt harmonieux, aux armures finement développées et commodes. Exception faite au premier, fin et laid. Tous furent discrets sous le fer, mal piqués la plupart du temps voir lamentablement pour le troisième, puis affichèrent des comportements variés dans le dernier tiers. Meilleurs pour le toreo les 4 et 5. Affligeant de faiblesse le 1, progressivement violent le 2, inédits les 3 et 6 que Pablo Aguado laissa passer sans vouloir les regarder.

Le public nîmois peu remercier Morante de la Puebla, qui devant le quatrième toro de la soirée prénommé « Simpatia » sauva la tarde du naufrage en cours. L’artiste andalou qui voulut bien déboucher le flacon proposa une faena aux courbes sublimes devant un animal noble, doté d’un léger fond de caste mais qui transmis peu. Pour la transmission, donnez les clés du camion à Morante ! Le sévillan débuta magistralement le long des tablas, sortant le public de sa torpeur par plusieurs échanges bien ficelés. A droite, Morante déploya une gestuelle raffinée, profonde, entre lenteur et dominio. Puis la gauche, pour une séance de naturelles enchanteresses. Plusieurs séquences inspirées sur les deux bords arrachant les olés du conclave, comme soulagé d’avoir vu l’œuvre de l’après-midi. Final par ayudados, puis naturelles pieds joints avant pinchazo puis entière efficace. Oreille ô combien légitime. Son premier « Sargento », désolant de faiblesse ne permis rien d’autre que deux naturelles données au ralenti.

Que Juan Ortega soit un véritable artiste, je ne le conteste pas. Le garçon est capable de distiller, comme face au quinto, d’authentiques séquences de toreo bueno. Mais l’andalou semble inexorablement fonctionner par séries. Trois bonnes tandas, trois moyennes puis trois médiocres. Face au premier de son lot, « Indicioso », Ortega fut discret à la cape puis proposa un labeur muletero parsemé de mouvements classieux, mais au résultat inabouti, se faisant constamment accrocher l’étoffe. On semblait se diriger tout droit vers une œuvre qui allait compter devant l’entame muletera du quinto par plusieurs séries emplies de temple et de sentiments. Hélas l’œuvre fut déclinante, devint brouillonne et Ortega, accroché puis dépassé balbutia ses bonnes intentions premières, jusqu’à plier les gaules. L’andalou conclu toutefois ses deux passages par lames sincères.

Pablo Aguado, avait laissé ce dimanche inspiration et envie sur les rives du Guadalquivir. Le torero andalou qui vit un début de temporada inquiétant, totalement dépassé par les évènements passa l’après-midi à côtés de ses zapatillas. Par deux fois, Pablo Aguado fit démolir ses adversaires lors du tiers de piques. Son premier « Fogonazo » fut lamentablement malmené par Mario Benitez qui plus tard fut repris de volée et à juste titre par le palco. Lidia bâclée, puis faena à l’engagement inexistant. Conclusion expédiée. La seconde prestation de l’andalou devant « Panameño » fut le triste copié-collé de la première. Sans envie et la confiance en bandoulière, Aguado fit presque passer le pauvre Jandilla pour le diable qu’il n’était pas. L’astado comme son frère échu au même sort resta inédit. Ni una pase ! Sombre après-midi. Heureusement Morante…

FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA

Arènes de Nîmes. Dimanche 5 Juin. Feria de Pentecôte. Grand soleil, chaleur caniculaire. Toros de Jandilla et Vegahermosa (3)

Présidence : Mr Pastor

Poids des toros : 507, 515, 508, 505, 506, 512.

Cavalerie Heyral . 12 piques

MORANTE DE LA PUEBLA (bleu floral et or) : silence et oreille après avis

JUAN ORTEGA (vert empire et or) : saluts après avis et applaudissements

PABLO AGUADO (groseille et azabache) : silence et silence

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