Peut-être que les aficionados sévillan, sensiblement démunis, auront parcourus ce samedi la centaine de kilomètre qui sépare Sanlucár de Barrameda, d’une ville de Séville injustement privée de toros à quelques jours de l’ouverture de la Feria de Abril. C’est en donc en direction du Coso del Pino qu’il fallait se rendre ce week-end pour voir des toros en Andalousie…
Une chambrée pleine, compte tenu de la jauge instaurée et imposée, pour chaleureusement saluer une terna pas franchement juvénile mais qui donna le change et bien plus encore. Dans les chiqueros, six exemplaires marqués du fer de Juan Pedro Domecq. Si l’on tient compte de la catégorie de l’arène, il ne fallait pas s’attendre a voir débouler six cathédrales hautement armées. Je vais volontiers qualifier de correct (hormis l’ultime) le format des six “Juan Pedro”. Quant aux armures, si l’afeitado n’est malheureusement plus une rareté, celui du jour m’a semblait bien vulgairement exécuté. Comme dirait l’autre, on ne refera pas le match… mais quand même.
Le premier de l’envoi dévolu à Enrique Ponce, vêtu d’un terno blanco y azabache en hommage au club du CF Valencia, reçu deux rations de fer de correcte exécution après avoir montré d’agréables signes de noblesse lors de la réception capotera soignée du diestro de Chiva. Enrique Ponce brinda son combat à Manuel Diaz “El Cordobes” de retour dans le circuit. Face à un animal au très bon fond et qui possédait pas mal de ressources physique, Ponce rendit rapidement facile ce qui pour certains aurait été plus difficile. La savoir et la maitrise du valencian ne sont plus a prouver et le vétéran du cartel “maitre ès toreo” édita une prestation compacte et précise, instrumentant un labeur de correcte note et dans le corte maison, qui porta sur les travées. Petit bémol en revanche sur l’usage à mon sens excessif du pico notamment sur les échanges droitiers. Final par génuflexions avant entière au deuxième essai.
Bis repetita dans le maniement de l’estoc face au quatrième de l’envoi de Parladé, noble mais terciado qui compliqua la tâche au chef de lidia du jour au moment de conclure. Avant cela, Ponce proposa un trasteo globalement similaire à son premier passage face à un animal opposant quelques complications. Sans surprise et sans profondément piocher dans ses ressources, le maestro de Chiva dessina d’agréables échanges sur les deux rives et en musique avant de perdre tout le crédit de son labeur épée en main.

Manuel Diaz “El Cordobès” deuxième du nom, effectuait son retour dans les ruedos après trois temporadas de “parón” devant un “Juan Pedro” à l’armure commode qu’il salua par quelques véroniques de bonne tenue. Disons le tout de suite, le torero né à Arganda del Rey n’a ni la planta ni le palmarès de son prédécesseur mais a pour lui la volonté de triompher et une condition physique épatante après trois années retiré des ruedos. Dans un style qui lui est propre, plutôt volubile et poblerino et qui personnellement m’émeut peu Manuel Diaz a proposé face à un noblissime cornu un trasteo de correcte facture sur les deux rives. Un labeur enjoué qui a visiblement conquis le public sanluqueño. Débuté de la droite par quelques mouvements de bon aloi, on relèvera la corvée entreprise sur la rive gauche à mon sens supérieure. Quelques desplantes maison dans un final enthousiaste avant de conclure par une entière d’effet rapide. Oreille.
Le quinto fut renvoyé vers les chiqueros et sorti en lieu et place un sobrero du même fer face auquel le Cordobes proposa un trasteo de correcte note , fuera de cacho tout au long de la partie mais toujours avec la volonté et le charisme qui le caractérise. Tout ne fut pas à jeter et face à un quadrupède noble mais aux forces déclinantes, Manuel Diaz dessina quelques mouvements méritants la moyenne notamment sur la rive droite. Faena un poil longuette et conclue dans un registre qui fit le succès du garçon, à savoir tremendista et les yeux rivés sur les tendidos. Conclusion par entière longue d’effet avant débâcle avec le descabello.

Emilio de Justo possède ce que beaucoup d’autres de ses compagnons de cartel n’ont pas, ou peu : l’entrega. Le garçon s’est fait une place au soleil de 17h depuis quelques temporadas déjà et n’a de cesse de justifier course après course le rang qui est désormais le sien. Face au troisième de l’envoi qui renversa la pièce montée sur l’unique rencontre, Emilio de Justo se signala par un maniement de la cape précieux dès l’entame jusqu’à un quite sublime par chicuelinas. Après deux bonnes paires de Morenito d’Arles, le maestro cacereño plia la jambe sur l’entame muletera avant de consentir le fauve, attiré par les tablas, à jouer le jeu. Ce que le Juan Pedro fit, a contrecourant de ses envies initiales mais avec une certaine noblesse. Emilio de Justo édita un trasteo de haute note sur les deux rives. Très en torero, assis sur les reins et la jambe toujours en avant, l’extremeño dessina de grandes séries notamment à gauche d’une sincérité et d’un engagement rare. L’estoconazo porté “en toda ley” est a montré dans toutes les écoles de tauromachie. Deux oreilles.
L’ultime, présenté tel un utrero de festival se montra discret sous le fer, comme la majorité de ses frères. Mais ramage et plumage parfois divergent… Le Juan Pedro se montra particulièrement noble dans le dernier tiers face à un torero en pleine possession de ses moyens. Emilio de Justo a une fois de plus étalé au grand jours les grandes capacités qui sont les siennes. Toréant avec un plaisir non dissimulé, impressionnant de maitrise et d’une toreria folle. Trasteo rondement mené, supérieur en tracé sur la rive gauche d’où surgirent les meilleures séquences avec notamment une poignée de trincherillas savoureuses. Hélas, le torero de Caceres s’embrouilla avec les instruments au moment de conclure, ce qui le priva de deux nouveaux appendices qu’il s’était justement gagné.

FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA
Plaza de Toros de Sanlucar de Barrameda. No hay billetes (de la capacité autorisée). 6 toros (5°sobrero) de Juan Pedro Domecq et 1 de Parladé (même maison).
Salut du banderillero Angel Gomez au sixième.
ENRIQUE PONCE: ovation et silence
EL CORDOBES : oreille et vuelta.
EMILIO DE JUSTO: deux oreilles et
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